mercredi 2 avril 2014

Saga Bush - Chapitre 05 /« Poppy » et « Mummy »


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Saga Bush - Chapitre 05 /« Poppy » et « Mummy »

 Chapitre V
Chapitre 5 – « Poppy » et « Mummy »

« Oh ! Mère, mère ! Qu’as-tu fait ? Vois !
Les cieux s’entrouvrent. Les dieux nous regardent
 et ne peuvent s’empêcher de rire de ce tableau contre nature. »
Coriolan, Shakespeare.

La cuiller en argent

George Herbert Walker Bush naquit à Milton, Massachusetts, le 12 juin 1924. Au cours de l’année suivante, la famille alla s’installer à Greenwich, Connecticut, et y établit sa résidence permanente. Prescott et Dorothy Walker Bush avait déjà eu un fils, Prescott, Jr., avant George. Plus tard, il y aurait également une petite sœur, Nancy, et un autre frère, Jonathan; un quatrième fils, William (« Bucky »), naquit quatorze ans après George, en 1939.
George reçut les prénoms et nom de son grand-père, George Herbert Walker. Du fait que la mère de George appelait le grand-père Walker « Pop », elle se mit à appeler son fils, homonyme, « Little Pop » ou « Poppy ». Depuis, « Poppy » est le surnom que les amis de la famille du président lui donne depuis son enfance.
Prescott, Sr. rejoignit la W.A. Harriman & Co. le 1er mai 1926. Avec les lucratifs projets totalitaires de sa famille, l’enfance de George Bush commença dans le confort et progressa dramatiquement vers le luxe et l’élégance.
Les Bush avait un grande maison couverte de bardeaux noirs, avec une « grande véranda et une porte-cochère » (à l’origine, une structure munie d’un toit s’étendant le long de l’allée d’entrée afin de protéger les gens qui s’amenaient en voiture) à Grove Lane, dans la section Deer Park de Greenwich.(1)
Ils y étaient servis par quatre serviteurs : trois femmes, dont une cuisinière, et un chauffeur.
Les Etats-Unis étaient plongés dans la Grande Dépression, qui avait commencé par le krach financier de 1929-1931. Mais George Bush et sa famille furent totalement isolés, par rapport à la crise. Avant et après le krach, leur existence représentait une partie de campagne, à cent lieues éloignée es problèmes de la population en général.
En été, les Bush occupaient une seconde résidence de la propriété familiale de 4 hectares qui s’étendait sur Kennebunkport, dans le Maine. Lancé par les transactions pétrolières soviétiques et par les arrangements entre Thyssen en le parti nazi, le grand-père Walker avait construit en cet endroit une demeure pour Prescott et Dorothy, lesquels, en même temps que d’autres colons bien nantis de l’été, fréquentaient le Kennebunkport’s River Club pour y jouer au tennis ou faire du yachting. Durant la saison d’hiver, ils prenaient le train pour la plantation du grand-père Walker, appelée « Duncannon », près de Barnwell, en Caroline du Sud. Les débutants apprenaient le ball-trap, faisaient ensuite des randonnées à cheval, suivant les chiens de chasse à la poursuite des cailles ou des palombes. Nancy, la sœur de George, se rappelle « le soin pris » par les serviteurs « à propos des moindres détails, comme les dentelures des pamplemousses. Nous étions attendus par des serviteurs noirs absolument admirables qui se présentaient dans les chambres, tôt le matin, pour allumer un pétillant feu de pin… »(2)
L’argent rentrait à flots, provenant de la ligne maritime Hamburg-Amerika et de sa main-d’œuvre dirigée de main de fer par le Front nazi du Travail. La famille s’installait encore dans une autre demeure, à Aiken, en Caroline du Sud, où les enfants Bush avaient des partenaires de tennis et d’équitation socialement acceptables. « A cette époque, Aiken était un centre sudiste du polo, un séjour d’été de très grande standing, très calme, qui attirait de nombreux nordistes, particulièrement parmi les gens férus d’équitation. Les enfants Bush, naturellement, y chevauchaient également… »(3) Averell Harriman, joueur de polo de classe mondiale, était lui aussi un familier d’Aiken.
Les père et mère de Poppy Bush faisaient avec le plus grand soin la promotion de la lignée distinguée de la famille et de son importance croissante dans le monde. Prescott Bush prétendait qu’il « pouvait retrouver les racines de sa famille aussi loin que l’époque du roi d’Angleterre Henri III, ce qui faisait de lui un 13e cousin, au second degré, de la reine Elizabeth. »(4)
Cette vanité particulière peut constituer un mauvais présage pour le président Bush. Le lâche Henri III, à la langue si perfide, fut vaincu par le roi de France Louis IX (saint Louis) au cours de la tentative de prise de pouvoir par ce même Henri III sur la France et une bonne partie de l’Europe. Les propres barons de Henri, à la fin, se révoltèrent contre sa maladroite arrogance et son pouvoir finit par être muselé. 
Lorsque la crise économique de 1930 s’aggrava, les Américains connurent des temps difficiles et des angoisses sans précédent. On enseigna aux enfants Bush que ceux qui subissaient cette crise n’avaient, tout compte fait, que s’en prendre à eux-mêmes.
Un pisse-copie, acheté pour vanter les antécédents militaires « héroïques » du président Bush, écrivit ces lignes à partir du matériel que lui avait fourni la Maison-Blanche :  
« Prescott Bush était un homme très économe… Il n’avait aucune sympathie pour les nouveaux riches se targuant de leur richesse – ils n’avaient aucune classe, disait-il. Homme sage et d’une honnêteté stricte, il avait souvent relancé des sociétés en faillite, les rendant à nouveau rentables, et il avait beaucoup de mépris pour les gens qui connaissaient la faillite pour avoir mal géré leur argent. Le jeune George absorba les leçons de Prescott. »(5)
Lorsqu’il atteignit l’âge de cinq ans, George Bush rejoignit son frère aîné Pres pour suivre les cours de la Greenwich Country Day School. « Les existences des frères furent programmées dès leur naissance. Leur père avait décidé que ses fils seraient éduqués et entraînés en vue de faire partie de l’élite américaine… La Greenwich Country Day School était une école exclusivement réservée à de jeunes garçons susceptibles de fréquenter les écoles secondaires privées…
« Alec, le chauffeur de la famille, conduisait chaaque matin les deux garçons à l’école après avoir déposé Prescott, Sr. à la gare ferroviaire  pour le trajet matinal vers Manhattan. Nulle part, la Dépression n’était visible pour les deux gosses qui, dans l’Oldsmobile familiale noire, longeaient les clôtures de piertre, les écuries et les piscines de l’une des communautés les plus riches de l’Amérique. »(6) 
Mais bien que le jeune George Bush n’eût aucune inquiétude à propos de son existence matérielle, on ne pouvait négliger l’importante anxiété personnelle qui l’étreignait et qui provenait de sa mère.
L’épouse du président, Barbara, avait posé très succinctement le problème représenté par Dorothy Bush et son effet sur George : « Sa mère était l’être humain vivant doué du plus fort esprit de compétition. »(7)  
Ici, si nous considérons l’ombre de sa mère, nous pouvons découvrir quelque chose qui va bien au-delà des habituelles explications médicales concernant les violents « accès de frénésie » ou l’hyperactivité du président Bush.
La mère Bush était la meilleure athlète de la famille, la plus rapide à la course à pied. Elle était dure. Elle attendait des autres qu’ils le fussent également. Ils devaient gagner tout en ne semblant pas soucieux de la victoire.
Tout ceci est exprimé avec nuance et délicatesse dans une « biographie » rédigée par un ami et admirateur du président Bush : « Elle était avec eux jour après jour (…) pliant souvent leur ego comme seul peut le faire un instructeur des marines. Un jour (…) lorsque George avait perdu un match de tennis, il lui expliqua que, ce matin-là, il n’était pas parvenu à sortir son jeu. Elle lui répliqua : ‘Tu n’as pas de jeu.’ »(8)
S’il faut en croire ce compte rendu, Barbara était fascinée par la férocité permanente de sa belle-mère. George, qui jouait des doubles mixtes avec Barbara sur le court de Kennebunkport, heurta une arcade et se blessa à l’omoplate gauche. « Sa mère me dit que c’est moi qui aurait dû renvoyer la balle et que c’était arrivé parce que je n’avais pas couru pour la reprendre. Elle avait probablement raison », raconta Barbara à la personne chargée de l’interviewer. Quand une discussion concernant le jeu de l’un ou de l’autre venait sur le tapis, raconte encore Barbara : « Si Monsieur Bush disait : ‘Elle a eu quelques balles excellentes’, cela voulait dire qu’elle était nulle. Voilà exactement la manière dont elle percevait le message. Lorsqu’un des petits-enfants amena sa copine à la maison, tout le monde dit : ‘Nous pensons qu’il va l’épouser’ et, elle Madame Bush rétorqua : ‘Oh non ! elle sera incapable de jouer au tennis.’ »(9)  
Une incitation à la rapidité de mouvement devint un élément à part entière de la personnalité de George Bush, comme on peut le voir tout au long de son existence.
Un trait apparenté réside dans l’étrange envie irrésistible de « Poppy », son obsession maîtresse du besoin de « racoler », de rassurer les personnes qui, d’une façon ou d’une autre, pouvaient faire progresser ses intérêts. Une existence parsemée de tels efforts pouvait à un point ou l’autre mener à un paroxysme de frénésie libérée, qu cours duquel le triomphateur pouvait dire, en fin de compte : « Désormais, je reste le seul à pouvoir susciter de la crainte. »
Ce cycle dangereux commença très tôt, c’était une réponse aux incitations et aux intimidations de sa mère. Il alla en s’intensifiant à mesure que George fut de plus en plus capable de calculer ses avantages.
Sa mère déclare :
« George était un enfant des plus généreux. Agé d’à peine plus de deux ans (…) , nous lui avions acheté une de ces voitures à pédales dans lesquelles on s’installe et qu’on fait avancer avec des pédales.
« Son frère, Pres, savait très bien comment la manœuvrer et George s’amena plein d’enthousiasme et saisit le volant pour dire à Pres qu’il en ‘aurait la moitié’, voulant dire par-là la moitié de sa nouvelle acquisition. ‘Prends la moitié, prends la moitié’, ne cessait-il de répéter et, pendant tout un temps, à la maison, nous l’avons donc appelé ‘Prends la moitié’. »(10)
George « apprit à ne réclamer pas plus que ce qui lui revenait. Bien qu’il ne fût pas premier de classe à l’école, ses bulletins étaient toujours bons et sa mère était particulièrement satisfaite qu’il ramenait toujours une cote d’excellence dans une branche qu’elle estimait d’une grande importance : ‘Ne réclame pas plus que la part qui lui revient de temps et d’attention’. Cette cotation répétée fut à l’origine d’une petite plaisanterie de famille : George était toujours excellent quand il s’agissait de ne pas ‘en vouloir plus’. Il n’était pas un enfant égoïste, il ne faisait même pas montre de cette innocente possessivité propre à la plupart des enfants… » (11)

Andover

George Bush quitta Greenwich Country Day School en 1936. Il rejoignit son frère aîné Pres à la Phillips Academy d’Andover, Massachusetts, à 30 kilomètres au nord de Boston. « Poppy » avait douze ans, il était élégant et riche. Bien que l’économie américaine dût prendre une vilaine courbe descendante l’année suivante, le père de George ne cessait d’entasser sa fortune, goupillant ses filouteries sur les spéculations au profit des nazis et ce, en compagnie de John Foster Dulles.
Seul un étudiant américain du secondaire sur 14 pouvait se permettre de suivre les cours d’une école privée, à l’époque du séjour de George Bush à Andover (1936-1942). Les écoles préparatoires ou « prep schools » de la Nouvelle-Angleterre étaient les plus huppées. Leurs étudiants étaient presque tous des jeunes blancs fortunés, parmi lesquels de nombreux épiscopaliens. Et, assez étrangement, dans un certain sens, Andover était la plus huppée de toutes.
En 1980, une biographie de campagne électorale préparée par l’équipe même de Bush admettait que « c’est vers la Nouvelle-Angleterre qu’ils étaient retournés pour recevoir leur éducation dans les écoles choisies qui produisent des dirigeants nantis d’une touche patricienne ou aristocratique – des adjectifs qui, incidemment, provoquent une crispation chez les Bush. (…) A la fin des années 30 (…) ces écoles (…) portèrent les célèbres ‘confréries d’anciens’ au faîte de leur puissance. »(12)
Ces institutions américaines ont été savamment modelées sur les écoles privées anglaises de l’élite (erronément appelées « écoles publiques » parce qu’ouvertes à tous les jeunes Anglais suffisamment nantis pour y accéder). La philosophie inculquée au fils d’un lord de l’amirauté britannique ou à celui d’un chef de la police en Afrique du Sud était la même qui allait être inculquée aux fils de la république américaine.
Au cours des premières années qu’il passa hors de chez lui, George fit quelques choix moraux décisifs à propos de sa propre personne. L’institution qui guida ces choix et contribua à donner forme aux obsessions particulières du 41e président, était un creuset de racisme aristocratique anglophile, lorsque George Bush y débarqua.
« Andover était moins (…) voué à l’élitisme que certaines écoles. (…) Il y avait même quelques noirs dans les classes, pour la forme, évidemment, mais ceci à une époque où un étudiant noir aurait été impensable dans quasiment toute autre prep school du Nord-Est. »(13)
Andover avait une « tradition » très prisée, en raison des fiers lignages de sang de ses étudiants et anciens élèves, tradition supposée remonter à la fondation de l’école en 1778. Mais une enquête plus approfondie révèle que cette « tradition » n’était qu’une supercherie. Elle fait partie d’une supercherie historique plus grande encore, hautement significative, lancée par les Anglo-Américains et, curieusement, très véhiculée par les agents de Bush dans les pays étrangers.
Au cours des années 20, Thomas Cochran, un partenaire de la société bancaire J.P. Morgan, fournit des sommes considérables pour construire de nouveaux bâtiments des plus chics à Andover. Parmi ces bâtiments, le George Washington Hall et le Paul Revere Hall, ainsi baptisés d’après les noms des dirigeants de la révolution américaine contre l’Empire britannique. Ces signes extérieures « patriotiques » et bien d’autres du même genre pourraient sembler indiquer que la lignée ininterrompue des impérialistes racistes du style de Cochran et de son milieu remonte aux héros de la révolution.
Survolons brièvement l’histoire d’Andover et examinons ensuite si le général Washington aimerait s’identifier à l’école de « Poppy » Bush.  
Trente ans après que Samuel Phillips eut fondé l’Académie d’Andover, Massachusetts, la petite école tranquille occupa le centre d’une controverse très virulente. D’un côté, il y avait certaines familles irréductiblement pro-britanniques, connues sous le nom des Brahmin de Boston, lesquelles avaient prospéré dans le transport maritime de rhum et d’esclaves noirs. Ils avaient repris le pouvoir à Boston depuis que leurs alliés avaient perdu la révolution américaine au cours des années 1775-1783.
En 1805, ces familles « tories » cyniques, néo-païennes, parvinrent à installer leur représentant à la chaire de philosophie Hollis de Harvard College. Les Tories, paradant en public comme des croyants libéraux appelés unitariens, étaient contrés par les nationalistes américains dirigés par le géographe et historien le révérend Jedidiah Morse (1761-1826). Les nationalistes rallièrent les églises chrétiennes des Etats du Nord-Est, soutenant un plan visant à établir à Andover même une nouvelle institution religieuse censée contrer les espions athées et criminels britanniques qui s’étaient emparés de Harvard.
Les agents politiques de l’Empire britannique, Stephen Higginson, Jr. et John Lowell, Jr., publièrent des contre-attaques contre le révérend Morse, prétendant qu’il essayait de pousser les classes inférieures des citoyens à la haine contre les prospères familles marchandes. Ensuite, les Tories jouèrent la carte « conservatrice ». Des calvinistes ultra-orthodoxes, en fait, les partenaires commerciaux des libéraux de Harvard, menacèrent d’installer leur propre institution religieuse à Newburyport, cité dominée par les Tories. Leurs propos disant que Morse n’était pas assez conservateur, divisèrent les effectifs des chrétiens de la région, jusqu’à ce que le groupe Morse amena sans plaisir les ultras de Newburyport à devenir des partenaires dans la gestion du séminaire de théologie d’Andover, en 1808.
Le nouveau séminaire de théologie et l’académie adjacente des garçons étaient désormais dirigés conjointement par un comité commun constitué d’administrateurs (réparti équitablement entre les nationalistes de Morse et les anti-nationalistes de Newburyport, les ailes opposées de l’ancien parti fédéraliste).
Jedidiah Morse fit d’Andover le quartier général d’un mouvement chrétien antiraciste, plutôt héroïque à l’époque, amenant l’alphabétisation, des presses d’imprimerie, des médicaments et l’enseignement religieux en Asie du Sud-Est et chez les Indiens d’Amérique, notamment chez les Cherokees de la Georgie. Cette doctrine militante d’Andover, qui prônait l’égalité raciale et l’esprit révolutionnaire américain était méprisée et crainte par les propagateurs britanniques de l’opium en Asie de l’Est et par les anglophiles à sang bleu de Boston. Les missionnaires d’Andover finirent par se retrouver en prison en Georgie : leurs alliés cherokees, trop modernes, furent massacrés ou déportés en exil par des bandes pro-esclavagistes.
Lorsque la génération de Jedidiah Morse disparut, le mouvement missionnaire d’Andover fut écrasé par les familles de l’élite de la Nouvelle-Angleterre – qui étaient, à l’époque, les partenaires de la Grande-Bretagne dans le trafic de l’opium en pleine expansion. Après 1840, Andover était toujours chrétien pour la forme. Les Brahmin cyniques de Boston se servirent du comité protestant orthodoxe d’Andover pour poursuivre plusieurs der leurs opposants pour « hérésie ».
Le néo-paganisme et d’autres mouvements occultes encore prospérèrent après la guerre de Sécession avec les nouvelles doctrines matérialistes de Darwin. Dans les années 1870, la société adoratrice de la mort des Skull & Bones rappela ses membres, anciens élèves de l’Université de Yale, afin d’organiser des sociétés sataniques secrètes et aristocratiques dans l’intention d’y accueillir les adolescents de la prep school d’Andover. Mais ces cultes ne rencontrèrent pas immédiatement le succès escompté. Le pouvoir national était toujours précairement partagé entre les financiers impérialistes anglo-américains et les nationalistes à l’ancienne qui construisaient les chemins de fer, les aciéries et les industries électriques de l’Amérique.
Les aristocrates de l’Ere nouvelle purent crier victoire sous la présidence de Théodore Roosevel (1901-1909). Le séminaire de théologie d’Andover rassembla ses cliques et ses claques et quitta la ville pour s’en aller fusionner avec la Harvard Divinity School. La prep school d’Andover était désormais débarrassée pour une bonne part des vicissitudes de la religion ou de toute connexion quelle qu’elle fût avec l’esprit américain. Les sociétés secrètes pour les enfants des écoles, modelées sur les ordres barbares de Yale, s’établirent dès lors dans leurs quartiers généraux permanents, installés dans des bâtiments construits en bordure du campus d’Andover. Des conseillers de l’école officielle furent attachés à chaque société secrète qui participait à leurs rites cruels, et d’une folie littéralement maladive.   
Lorsque le partenaire de J.P. Morgan, Thomas Cochran, construisit le luxueux campus moderne d’Andover pour les garçons du genre Poppy Bush, les usurpateurs du nom de l’Amérique eurent motif à pouvoir et une cause à célébrer. Sous leur égide, le fascisme opérait sa montée en Europe. La nouvelle bibliothèque du campus fut baptisée du nom d’Oliver Wendell Holmes, de la classe 1825 d’Andover. Ce terrible poète de la « classe des oisifs », pilier de la vanité des Bostoniens au sang bleu, fut célèbre en tant que père de la justice de la Cour suprême des Etats-Unis au 20e siècle.  Son fils, Oliver Wendell Holmes, Jr., symbolisa le rôle arbitraire des défenseurs de la pureté raciale, les usurpateurs, sur la société américaine.
Andover désigna un nouveau principal en 1933. Claude Moore Fuess (pron. fiou-iss) remplaça le vieux principal Alfred E. Stearns, en qui les Brahmin voyaient un réactionnaire à tous crins. Stearns fut obligé de s’en aller suite à un « scandale » : Veuf, il avait épousé sa gouvernante, dont le niveau social était nettement en dessous du sien.
Le nouveau principal était considéré comme progressiste et flexible, prêt à relever les défis de la crise politique mondiale : par exemple, Fuess était partisan de la psychiatrie pour les garçons, le genre de chose que Stearns n’aurait jamais tolérée.
Dès 1908, Claude Fuess avait été professeur d’histoire à Andover et il avait acquis une renommée en tant qu’historien. Il fut l’un des menteurs les plus adroits de l’époque moderne.
Fuess s’était marié au sein de la famille Cushing, de Boston. Il avait rédigé la biographie expurgée et autorisée de la famille d’un parent de son épouse, Caleb Cushing, un politicien pro-esclavagiste du milieu du 19e siècle. la corruption bien connue et étrange qui émailla toute la carrière de Cushing n’eut d’égale que la manière éhontée et téméraire avec laquelle Fuess gomma tout ce qui ne devait pas se savoir.(14)
Au cours des années passées par George Bush à Andover, Fuess, sont principal, écrivit une biographie autorisée de Calvin Coolidge, l’ancien président des Etats-Unis, décédé. Cette œuvre fut encensée comme le type même du spécimen de flatterie malsaine. Dans d’autres ouvrages, également sur les « sang bleu », Fuess se vit tout simplement remettre les papiers de la famille et on le désigna comme le menteur en chef de la « race des Bostoniens »..
Les deux familles, Cushing et Coolidge, avaient réalisé leur fortune dans le trafic de l’opium. Le principal de Bush appela son fils John Cushing Fuess, peut-être d’après le fabuleux roi de la drogue du 19e siècle, lequel avait fait la ortune des Cushing.(15)
Le principal Fuess disait habituellement à son équipe : « Je suios venu au pouvoir en même temps que Hitler et Mussolini. »(16) ce n’était pas une simple plaisanterie faisant référence à sa nomination l’année même où Hitler s’empara du pouvoir en Allemagne.
Dans ses mémoires, datées de 1939, le principal Fuess exprimait la philosophie qui devait guider l’éducation des jeunes gentilshommes bien nés confiés à ses bons soins :
« Notre taux de naissance en déclin (…) peut peut-être se révéler comme un pas vers la dégénérescence nationale. Parmi ce qu’on appelle les classes supérieures et oisives, et c’est particulièrement vrai parmi le groupe de l’université, l’actuel taux de naissance est remarquablement faible. Parmi les immigrants slaves et latins, d’autre part, il est relativement élevé. Il semble par conséquent que nous laissons se diluer et disparaître le meilleur sang alors que, dans un même temps, on encourage fortement nos efforts humanitaires en vue de la préservation du moindre nombre et qui favorisent ceux qui, pour l’une ou l’autre raison, sont infirmes et handicapés. L’effet sur la race ne deviendra pas apparent durant plusieurs générations et il ne peut actuellement être prévu correctement; mais le phénomène doit être mentionné si vous voulez avoir une image réelle de ce qui se passe aux Etats-Unis. »(17)
George Bush allait-il faire sienne cette conception anti-chrétienne ? On ne peut jamais savoir avec certitude comme un jeune individu va réagir aux doctrines de ses aînés, qu’importe l’habileté avec laquelle elles sont formulées. Il y a un degré de certitude bien plus élevé pour dire qu’il va se conformer aux attentes criminelles, toutefois, si l’étudiant est entraîné à pratiquer la cruauté contre d’autres jeunes et à se dégrader soi-même afin de faciliter sa propre ascension. A Andover, c’était là où les sociétés secrètes voulaient en venir, justement.

Les sociétés secrètes

Il n’existait rien dans aucune école américaine qui puisse rappeler les sociétés secrètes d’Andover. Quelles étaient leurs préoccupations ?
Un ami de Bush, Fitzhugh Greene, écrivait en 1989 :
« Robert L. ‘Tim’ Ireland, supporter de longue date de Bush [et partenaire de la Brown Brothers Harriman],  et qui, plus tard, exerça des fonctions au sein du comité des mandataires d’Andover, dit qu’il croyait que Bush avait fait partie des AUV. ‘C’est quoi ?’ demandai-je. ‘Peux pas vous dire’, rigola Ireland, ‘c’est secret !’. Tant à Andover qu’à Yale, de tels groupes ne rassemblent qu’un faible pourcentage du rôle total de chaque classe. ‘C’est un tantinet cruel pour ceux qui ne dont pas partie des AUV ou des ‘Bones’, ‘ admit Ireland. »(18)
Un professeur retraité  qui avait été conseiller de l’un de ces groupes, dévoila prudemment dans son historique de deux siècles d’Andover, certains aspects des sociétés secrètes. Le lecteur devrait garder à l’esprit que ce compte rendu fut publié par l’école, pour se mettre elle-même en exergue.
Un compte rendu plaisant des premières années de la KOA, la plus ancienne des sociétés, fut établi par Jack (c’est-à-dire Claude Moore) Fuess, membre de l’organisation, à l’occasion de son 50e anniversaire. La société avait été fondée en… 1874…
Une préoccupation majeure des membres consistait dans la cérémonie d’initiation. Au sein de la KOA, la cérémonie impliquait la visite de l’un des cimetières locaux à minuit, diverses sortes de tortures, ou soutenir un feu roulant de toute une série d’épreuves – bien que le novice fût apparemment maltraité plutôt que brimé, puisqu’on le baptisait dans un réservoir d’eau, qu’on le hissait en, l’air à la poulie et qu’on l’installait finalement dans un cercueil où il subissait des contre-interrogatoires de la part des membres. (…) La KOA était capable de conserver la fidélité de ses membres durant des années au point de devenir une institution puissante à la Phillips Academy et d’ériger un siège de société élégamment installé à School Street.  .
La seconde société parmi les sept qui allaient se maintenir jusqu’en 1950 fut l’AUV (le groupe de George Bush). Les initiales signifiaient Auctoritas, Unitas, Veritas. [Autorité, Unité, Vérité]. Cette organisation provenait d’une fusion (…) de deux sociétés plus anciennes (…) en 1877. Une nouvelle constitution fut instaurée (…) fournissant quatre responsables principaux : l’imperator (le commandant), le vice-imperator (vice-commandant), le scriptor (secrétaire) et le quaestor (magistrat ou inquisiteur)…
A l’instar de la KOA, l’AUV avait une cérémonie d’initiation compliquée. Une fois qu’un candidat avait été approuvé par la Faculté, on lui remettait une lettre avec une liste des règles qu’il allait devoir suivre. Il devait se trouver dans le cimetière chaque soir de 0 heure 30 à 5 heures du matin, remettre un journal du matin à chaque membre de la société. le matin, il ne pouvait ni peigner ni brosser ses cheveux, ni laver son visage ou ses mains, ne rien fumer d’autre qu’une pipe d’argile avec du tabac de Lucky Strike et ne parler à aucun étudiant, si ce n’est avec les membres de l’AUV.
Après que l’initié avait pris connaissance de ces règles, sa lettre d’instructions était brûlée. Le candidat était désormais un « scut » et il était obligé d’apprendre des tas de phrases amusantes et on l’emmenait au drugstore Hartigan, où on lui servait un « scut sundae » (une glace pour scut) composée de poivre, de crème glacée, d’huîtres et de foie cru. Plus tard, au cours de la même soirée, il retournait se présenter au cimetière de South Church où il devait attendre deux heures que les membres arrivent. Il s’ensuivait les habituels jeux d’étudiants – on se servait du scut comme d’un mannequin de plaquage (football US), on le menaçait de l’enfermer une tombe et on observait divers autres rites. Le samedi après-midi, on emmenait le scut pour une longue promenade autour de la ville, on l’obligeait à s’arrêter à certaines maisons et à quémander de la nourriture, à uriner sur divers porches et généralement à se faire passer pour un parfait imbécile. Le samedi soir, c’était l’initiation proprement dite. On préparait le scut à retourner à sa chambrette en sous-vêtements et avec des saletés et de la farine répandues sur tout le corps. Finalement, on le lavait et on l’amenait à la salle d’initiation où s’ensuivait une cérémonie solennelle se terminant par les mots tant attendus : « Qu’on lui confère la lumière ! » et, à ce moment, on lui ôtait son bandeau, on prononçait certains serments et imprécations et le garçon était enfin admis comme membre.
Peu après 1915, l’actuel siège de l’AUV fut bâti. Dès lors, et jusqu’à la crise de la société secrète, en 1940, l’AUV assura son emprise et sa prospérité. Bien sûr, kil y eut certains problèmes. Au milieu des années 20, le degré d’érudition de la société chuta à des profondeurs abyssales. Les membres avaient engagé des étudiants illégalement – sans l’approbation du gardien de la Faculté. Lors d’une initiation, un garçon avait été tellement molesté qu’il avait été incapable de courir dans la rencontre d’athlétisme opposant Andover à Exeter. (…) Pourtant, la société s’arrangea pour surmonter ces problèmes et elle mérita bien sa situation en devenant l’une des trois principales sociétés d’école. (19)
Selon toutes les preuves disponibles, à l’école préparatoire d’Andover, George Bush était complètement obsédé par son statut, qui semble avoir été important. Sa biographie, pour la campagne de 1980, insiste avec gloriole sur le fait qu’il atteignit son but :
« Il y avait, comme cela avait toujours été le cas dans toute institution, un élitisme dans les relations du groupe qui gérait les affaires, le groupe du pouvoir parmi les garçons qui se reconnaissaient mutuellement comme des égaux. George faisait partie de ce groupe mais, pour lui, c’était naturel. (…) »(20)
L’équpe principale de l’AUV, 32 membres, y compris George Bush, est citée dans l’annuaire classe 42 d’Andover. Pourquoi était-il « naturel » que George fît « partie de ce groupe » ?
Le grand chef hiérarchique de l’AUV dans la classe de George était Godfrey Anderson (« Rocky ») Rockefeller. Dans l’annuaire, juste au-dessus de l’équipe principale d’Andover, on peut voir une photographie de « Rocky Rockefeller » et de « Lem [Lehman F.] Beardsley »; Rockefeller se pavane d’un air impérial, vêtu d’une chemise, Beardsley a un air menaçant derrière ses lunettes solaires. Il est certain que le véritable monarque de la société secrète d’Andover, dont faisait partie George Bush, et en même temps le sponsor de George, était le père de Rocky, Godfrey S. Rockefeller.
Ce dernier avait fait partie de l’équipe de l’établissement de l’Université de Yale en Chine, en 1921-1922. Yale et les Rockefeller alimentaient une grotesque insurrection communiste contre l’idéologie de l’Empire britannique; un autre membre de Yale sur place était Mao Zedong, plus tard dictateur communiste et boucher notoire. Alors qu’il était en Chine, la cousine Isabel du père Godfrey avait été la demoiselle d’honneur du mariage des parents de George Bush. Son oncle Percy avait cofondé la banque Harriman avec George Walker et avait soutenu le père de George Bush dans plusieurs entreprises de l’Allemagne nazie. Son grand-père avait été le trésorier fondateur de la Standard Oil Company, et il avait enrichi les Harriman (et donc, en fin de compte, George Bush).
A cette époque, le conseiller de la Faculté à l’AUV était Norwood Penrose Hallowell; son père, du même nom, était président de Lee, Higginson & Co., banquiers privés et principaux financiers des mouvements politiques les plus racistes de Boston. Le vieux Hallowell s’était cantonné à Londres tout au long des années 30, entretenant des relations très amicales avec Montagu Norman et ses amis banquiers américains qui soutenaient Hitler.
Mais ce genre de soutien en soi ne peut garantir qu’une personne va se hisser au sommet, vers un authentique statut de « gros bonnet ». Pour y arriver, il faut le vouloir vraiment, à tout moment.
L’un des professeurs de Poppy Bush à Andover, aujourd’hui retraité, présenta à un interviewer travaillant pour le présent ouvrage une image étonnante de son ancien élève. Comment était le président Bush lorsqu’il était étudiant ?
« En classe, il ne disait jamais un mot. Il s’ennuyait à mort. Et d’autres professeurs m’ont dit que Bush était le pire étudiant en anglais qui ait jamais mis les pieds à l’école. »
Mais cet adolescent était-il simplement un peu lent, ou stupide ? Au contraire, « c’était le BMOC classique (Big Man on Campus – Une vedette du campus). Un grand gars chaleureux. Toujours en train de sourire. »(21)
A part ses études académiques, George Bush fut le promoteur de soi-même le plus acharné du campus. Il était à même de poursuivre cette carrière, étant par bonheur déchargé des tâches plus banales auxquelles devaient s’astreindre les autres étudiants. Par exemple, il envoyait son linge sale chez lui chaque semaine, afin qu’il soit lavé par les serviteurs. On le lui renvoyait propre et repassé.(22)
Les archives estudiantines montrent une liste énorme de responsabilités et de titres pour Poppy, peut-être même plus que pour tout autre étudiant :
O AUV
O Président de la classe des seniors (1 trimestre)
O Secrétaire du conseil des étudiants (1 trimestre)
O Conseil des étudiants (1941-42) (surveillance des étudiants durant les épreuves, assurer l’ordre durant les séances de cinéma, enquêtes sur les voleurs parmi les étudiants)
O Président de la société d’enquête (1941-42)
O Comité de promotion des seniors
O Président des doyens étudiants (1941-42)
O Comité de conseil (direction des sports, choix de la police P.A. afin de contrôler le corps estudiantin, choix des meneurs de ban)
O Président des Grecs (1940-42)
O Capitaine de base-ball (1942)
O Capitaine de football (1941)
O Manager du basket-ball (1941)
O Société d’enquête (1940-42) (anciennement un groupe de mission chrétienne, aujourd’hui direction des activités extra-scolaires)
O Doyen des étudiants (1940-42)
O Comité de rédaction du « Philippian » (1938-39)
O All-club soccer (football US tous clubs) (1938)
O Comité commercial du « Pot Pourri » (1940-42)
O Adjoint au chef des chambrées
O Equipe universitaire de football (1939-41)
O Equipe universitaire de basket-ball (1941-42)
O Equipe universitaire junior de base-ball (1939)
O Equipe universitaire de base-ball (1940)
O Equipe universitaire de base-ball (1941-42)
O Prix John Hopkins (1938)
O Trésorier du conseil estudiantin (1 trimestre)

On peut être sûr, toutefois, que certaines de ces distinctions représentaient un peu moins que ce qu’il en avait espéré.
La classe de 1942 fut officiellement consultée afin de voir qui avait le plus de statuts parmi les étudiants eux-mêmes.
Pour le « Meilleur membre en général », Poppy Bush était troisième. Bush n’apparaissait pas dans la  catégorie des « Elèves les plus intelligents ».
Il est intéressant de noter que Bush arrivait en seconde place dans « le plus gros piston de la faculté » - les chouchous des professeurs – même si Bush n’apparaissait pas du tout sur la liste des honneurs scolaires de l’école. En fait, aucun membre de l’AUV Rockefeller-Bush ne figurait sur cette liste des honneurs, en dépit du fait qu’ils chantaient des incantations, qu’ils avaient été couverts de saletés et qu’ils avaient uriné sur des porches de maisons.

La tradition de Barbara Pierce
Les Japonais attaquèrent la base américaine de Pearl Harbor, Hawaii, le 7 décembre 1941, plongeant ainsi l’Amérique dans la Seconde Guerre mondiale. En raison de l’implication de sa famille avec les nazis, ceci allait poser plus tard un problème très différent de ceux des jeunes hommes ordinaires de son âge, pour le senior d’Andover, Poppy Bush.
En attendant, le tourbillon social se poursuivait. Quelques semaines après Pearl Harbor, durant les vacances de Noël, George se rendit à un « bal du Round Hill Country Club de Greenwich, Connecticut. Il s’agissait d’une affaire sociale à laquelle assistaient les débutantes en devenir et les jeunes hommes présentables. »(23)
C’est là que George Bush rencontra sa future épouse, Barbara Pierce, dont la famille appartenait à la haute société de Rye, New York. Barbara était une attirante jeune fille de 16 ans, athlétique à l’instar de la mère de George. Elle passait ses vacances en famille, après être rentrée de son école élitiste, Ashley Hall, à Charleston, en Caroline du Sud. Son éducation était acceptable :
« Le milieu de Barbara, bien que pas aussi aristocratique que celui de George, était également impressionnant sur le plan social, à une époque où la société se définissait encore en fonction de l’éducation plutôt qu’en fonction de la richesse. Son père, Marvin Pierce, était un lointain neveu du président Franklin Pierce (1853-57). (…) La mère de Barbara, Pauline Robinson (…° était la fille du juge de la Cour suprême de l’Ohio. »(24)
Le père de Barbara, Marvin Pierce, était à l’époque vice-président de la McCall Corporation, l’éditeur des magazines Redbook et McCall. Après que sa fille eut rallié l’oligarchie bancaire en se mariant au sein de la famille Bush (1945), Pierce devint le PDG de McCall. Pierce et le thème de son magazine, « Togetherness » (Harmonie familiale) – mettant en valeur une existence familiale séparée des activités politiques, scientifiques, artistiques ou créatrices – jouèrent un rôle dans le culte de la conformité et de la médiocrité qui écrasaient la vie mentale et affective américaine des années 50.
Grand cas est fait des connexions de la famille de Barbara Pierce Bush avec le président des Etats-Unis Franklin Pierce. Elles ont été reprises dans des ouvrages rédigés par des amis de Bush et des membres de son état-major. Le biographe à potins de Barbara Bush écrit : « Son propre arrière-arrière-grand-oncle, le président Franklin Pierce, avait son bureau (à la Maison-Blanche) dans la salle des Traités… » En fait, le président Pierce n’était qu’un lointain cousin de l’arrière-arrière-grand-père de Barbara Pierce et non son frère, comme cette affirmation semble le prétendre. **

** Etabli après consultation de la New Hampshire Historical Society et des experts au sujet de la famille Pierce en Pennsylvanie, ce fait est corroboré par l’équipe de Madame Bush à la Maison-Blanche.

De même que les prétentions ancestrales faisant référence à Henry III, Franklin Pierce peut constituer un mauvais augure pour George Bush. Le catastrophique Pierce se fit refuser sa réélection par son propre parti politique. Pierce soutenait des plans visant à répandre l’esclavagisme en faisant envahir le Mexique, l’Amérique centrale et les îles Caraïbes par des mercenaires, appelés les « flibustiers ». Au cours de la guerre de Sécession, il s’en prit à la Proclamation d’Emancipation qui mettait hors-la-loi l’esclavage des noirs dans les Etats rebelles. Ses anciens partisans parmi les riches familles de la Nouvelle-Angleterre l’abandonnèrent et le traitèrent comme du rebut. Il mourut sans laisser de regrets, en 1869.
On peut se demander de quelle manière le président Bush et ses partisans sont conscients d’une tradition oligarchique. Pour s’en faire une idée, examinons le cas d’Arthur Burr Darling, le professeur d’histoire de la prep school de George Bush.
Immédiatement après que Claude Fuess « eut pris le pouvoir en même temps que Hitler et Mussolini », en 1933, Fuess fit entrer Darling comme enseignant. Le docteur Darling fut chef du département d’histoire d’Andover de 1937 à 1956, et gardien de la Faculté de l’une des sociétés secrètes. Son ouvrage, « Political Changes in Massachusetts, 1824 to 1848 » (Changements politiques au M., de 1824 à 1848) couvre la période où Andover avait été éclipsé par les seigneurs aristocratiques de l’opium de Boston. Le livre de Darling attaque le plus grand humaniste d’Andover, Jedidiah Morse, le présentant comme un fou dangereux parce que Morse mettait en garde contre des conspirations criminelles internationales impliquant ces Bostoniens respectables. Le même ouvrage attaque le président John Quincy Adams en le traitant de trublion mal inspiré, responsable, avec Morse, du mouvement anti-maçonnique des années 1820-1830.
Alors qu’il était toujours à la tête du département d’histoire d’Andover, Arthur Burr Darling fut choisi par la clique Harriman pour organiser les dossiers historiques de la nouvelle CIA et de rédiger l’histoire officielle de la CIA lors de sa création et de ses premières années. L’obituaire de Darling, en 1971, ne mentionnait pas ses services à la CIA.(25) Le travail de Darling, The Central Intelligence Agency : An Instrument of Government, to 1950 (La CIA, depuis sa fondation jusqu’en 1950, un instrument du gouvernement) fut classé secret lorsqu’il fut terminé en 1953. Durant 36 ans, on ne put le consulter que pour auto-justification du chef de la clique Harriman. Ce travail mercenaire fut finalement déclassifié en 1989 et fut publié par la Pennsylvania State University en 1990. Des éditions successives de Who Was Who in America (Qui était qui en Amérique) furent modifiées, à la façons des « remodeleurs de l’histoire » de Joseph Staline, pour offrir la toute dernière version officielle de ce que le professeur d’histoire de George Bush avait fait de sa vie.

 

La crise

Après avoir rencontré sa future épouse Barbara, Poppy Bush termina ses vacances de Noël au lendemain du 1er janvier 1942 pour passer ses derniers mois à Andover. L’entrée des Etats-Unis dans la Seconde Guerre mondiale rendit les choses plutôt pénibles pour Bush et nombre de ses condisciples et allait projeter une ombre particulièrement sombre sur son avenir.
Depuis le début 1941, le département de la Justice avait enquêté sur l’appareil de soutien aux nazis parmi les firmes américaines. Cette enquête s’intéressa tout particulièrement aux firmes Harriman, Rockefeller, DuPont et aux entreprises apparentées, impliquant Prescott, le père de George Bush, ses partenaires et les proches amis de la famille Bush.
Le 5 mars 1942 – à peu près au moment où Poppy Bush et Rocky Rockefeller envisageaient les tortures qu’ils allaient infliger aux recrues de l’AUV de la classe 1943 – la commission spéciale du sénat américain enquêtant sur le programme de défense nationale entama des interrogatoires publics explosifs à Washington, DC. Le sujet : accords de cartel entre les firmes américaines et nazies qui devraient être frappés par les mesures anti-trust. Pearl Harbor, la conscription des jeunes Américains et ces interrogatoires à sensation provoquaient une attitude populaire très dangereuse pour les collaborateurs nazis du plus haut niveau (voir chapitre 2).
Mais, le 20 mars 1942, Henry L. Stimson, secrétaire d’Etat américain à la Guerre et « président du conseil des mandataires de la prep school d’Andover », adressa un mémoire au président Franklin Roosevelt lui recommandant de mettre un terme aux enquêtes sur les trusts américano-nazis. car les procès qui en résulteraient allaient « inévitablement gaspiller le temps des agents et employés de ces sociétés qui sont engagées dans le travail de la guerre ». Stimson rallia le secrétaire à la Marine Frank Knox et l’attorney général adjoint Thurman Arnold afin qu’il signent tous deux le mémoire. Le président Roosevelt abonda dans le sens de la requête de Stimson, mais admit auprès d’Arnold et de son équipe anti-trust qu’il allait insister pour obtenir de plus importants statuts de limitation afin de rendre possibles les poursuites après la guerre.(26)
L’intervention de Stimson en faveur de ses amis ne put toutefois pas entièrement annuler l’accusation déjà en cours et les poursuites lancées contre la Standard Oil of New Jersey de Rockefeller, comme nous l’avons vu dans le chapitre 4. Après la mort de Farish, les poursuites furent suspendues, mais les saisies des avoirs des sociétés nazies se poursuivirent et ceci allait bientôt conduire à Prescott Bush et au grand-père Walker. Pouvait-on compter sur des amis de l’aristocratie pour empêcher le scandale ou les problèmes judiciaires de faire voler en éclats le monde de Poppy et ruiner ainsi son avenir doré si soigneusement préemballé ?
Comme George terminait son temps à Andover et qu’il faisait la cour à Barbara, les enquêteurs du gouvernement américain passaient au crible les affaires des lignes maritimes Hitler-Harriman-Bush de la Hamburg-Amerika et de la North German Lloyd. Leur rapport final, sorti sous sceau confidentiel le 18 juillet 1942, allait montrer que le directeur de longue date de Harriman-Bush, Christian J. Beck, était toujours l’avocat new-yorkais des firmes nazies fusionnées. (Voir chapitre 3 pour les détails et les descriptions des sources).
Les ordres de saisie concernant les lignes maritimes allaient sortir en août. En automne, le gouvernement allait saisir d’autres avoirs nazis, toujours dirigés par la famille Bush. Prescott Bush, légalement responsable des opérations bancaires nazies à New York, allait devoir être cité dans un ordre de saisie. Les amis haut placés allaient-ils pouvoir soustraire la chose au regard du public ?
A cette même époque, plus ou moins, les choses allaient très mal dans les sociétés secrètes de la prep school d’Andover.
L’historien d’Andover, comme on l’a déjà cité plus haut, affirmait que « jusqu’à la crise de la société dans les années 40, l’AUV se maintint avec vigueur et succès ». Mais quelques mois après que Poppy Bush et Rocky Rockefeller eurent quitté l’école, le principal Fuess et les mandataires annoncèrent qu’ils allaient fermer et interdire à jamais les sociétés secrètes. Cela souleva toute une série de controverses.
L’AUV de Bush avait humilié des étudiants et avait enseigné des rituels anti-chrétiens depuis 1877. Fuess lui-même était membre de l’une des sociétés. Que s’était-il passé pour précipiter cette décision plus que sévère ?
La grande crise de la société à Andover subit un poids terrible parce qu’un très grand nombre d’anciens et de parents des actuels étudiants étaient des dirigeants du gouvernement et des finances. Un vilain scandale là-bas allait se répercuter partout dans le monde. Quel que soit l’événement qui ait réellement hâté la décision d’interdiction, la chose fut rigoureusement tenue secrète et, aujourd’hui, un demi-siècle plus tard, elle reste toujours nimbée de mystère.
Le principal Fuess prétendit qu’un événement qui s’était produit 9 ans plus tôt l’avait poussé à prendre cette décision. Cet événement fut soigneusement relaté dans le livre narrant l’histoire d’Andover :
« En 1934, un étudiant avait été tué au cours d’une initiation à la société. Un groupe d’anciens avaient rejoint les étudiants pour une partie des cérémonies qui se tenaient dans une grange des alentours d’Andover. Sur le chemin, du retour, l’initié roula sur le marchepied d’une voiture conduite par l’un des anciens. Les routes étaient glissantes et la voiture s’écrasa contre un poteau télégraphique, écrasant le garçon qui mourut quelques heures plus tard, à l’hôpital, en présence du Dr Fuess. »(27)
Mais cette tragédie avait été occultée par l’administration de l’école, sans la moindre suggestion d’interférer dans les sociétés sataniques. Y eut-il un autre drame plus dramatique encore dans la classe 43 des recrues de la société secrète ?
Lorsque les anciens apprirent la décision, ils passèrent aussitôt à l’action. Ils accusèrent Fuess de « fascisme » et attaquèrent ses « agissements dignes de la Chambre étoilée ». Les gros-titres d’un journal de Boston proclamèrent « 10.000 anciens d’Andover en lutte contre les administrateurs qui veulent l’abolition des sociétés secrètes ». Le principal, ne justifiant en aucun cas sa proposition, déclara « que le but pour lequel les sociétés secrètes avaient été fondées ne semble plus apparent ». Ses alliés dirent très vaguement que les sociétés « promouvaient l’exclusivité », agissaient « sur base de privilèges spéciaux » et qu’elles provoquaient un « clivage social ».(28)
La décision prise furtivement et, entre-temps, largement répandue dans le public, devait être appliquée. la président du comité des mandataires d’Andover, le secrétaire à la Guerre Stimson, trancha le problème et garda certaines choses secrètes en utilisant son refrain familier disant que l’effort de guerre ne devait pas être dérangé. Quelle que soit la raison qui ait poussé Fuess et les administrateurs à agir, la chose ne fut jamais révélée. Les sociétés furent discrètement fermées en 1950.
Le secrétaire à la Guerre Stimson tint en juin 1942 un fameux discours adressé à Poppy Bush et aux autres diplômés d’Andover. Stimson leur dit que la guerre allait être longue et qu’eux, l’élite, devaient poursuivre leurs études au collège.
Mais George Bush avait pas mal de problèmes très compliqués. Sa décision avait déjà été prise : il allait rallier les forces armées et se tenir très éloigné des endroits qu’il avait jusque-là fréquentés. Pour des raisons de famille (dont il sera question dans le chapitre 7), il y eut une planque très spéciale prévue pour lui dans l’aviation navale.
 Il y avait une entrave très sérieuse, dans ce plan. Il était illégal. Bien que George Bush allât avoir 18 ans le 12 juin, il n’aurait pas les deux années universitaires requises par la Navy pour ses aviateurs.
Eh bien, si vous avez un problème urgent, peut-être peut-on mettre tout simplement la loi de côté, pour vous et rien que pour vous, en priorité sur 5 millions de pauvres diables qui devraient affronter la boue avec l’infanterie ou nettoyer quelque pont puant – spécialement si le président de votre école privée était présentement secrétaire à la Guerre (Henry Stimson), si le partenaire bancaire de votre père était présentement secrétaire adjoint à la Guerre, section Aviation (Robert Lowett) et si votre père avait lancé la carrière de l’actuel secrétaire adjoint à la Navy, section aviation (Artemus Gates).
Et ce fut fait.
Et une version, autorisée par Bush, l’exprime en ces termes : « On se demande pourquoi la Navy a libéré George Bush de ses deux années d’université exigées pour entraînement au vol. Il avait atteint d’excellents sommets à l’école en tant qu’érudit (sic), athlète et dirigeant de campus, mais c’était aussi le cas pour d’innombrables milliers d’autres jeunes.
« Pourtant, ce fut George Bush qui s’avéra le seul bénéficiaire de cette suppression de règle et il apparut finalement comme le plus jeune pilote de la Navy – un fait dont il peut toujours se vanter et en raison duquel il jouit d’une certaine célébrité durant la guerre. »(29)



 

Notes chapitre V

1. Nicholas King, George Bush: A Biography, New York, Dodd, Mead & Company, 1980, pp.13-14.
2. Ibid., p.19.
3. Ibid.
4. Joe Hyams, Flight of the Avenger: George Bush at War (Le vol du vengeur : George Bush et la guerre), New York: Harcourt, Brace, Jovanovitch, 1991, p.14.
5. Ibid., p.17.
6. Ibid., pp.16-17.  
7. Donnie Radcliffe, Simply Barbara Bush (Barbare Bush, tout simplement), New York, Warner Books, 1989, p.132.
8. Fitzhugh Green, George Bush: An Intimate Portrait (GB, un portrait dans l’intimité), New York, Hippocrene Books, 1989, p.16.                                                                   9. Radcliffe, op. cit., p.133.
10. King, op. cit, p.14.
11. Hyams, op. cit., pp.17-19.
12. King, op. cit., pp.10, 20.
13. Ibid., p.21.  
14. Claude M. Fuess, The Life of Caleb Cushing (La vie de Caleb Cushing), 2 vol., New York, Harcourt, Brace and Company, 1923.
15. John Perkins Cushing fut un trafiquant d’opium multimillionnaire qui se retira à Watertown, Massachusetts avec des serviteurs habillés comme pour un carnaval de gangsters de Canton. Voir Vernon L. Briggs, History and Genealogy of the Cabot Family, 1475-1927 (Histoire et généalogie de la famille Cabot, 1475-1927), Boston, édité à comte d’auteur, 1927, vol. II, pp.558-559. John Murray Forbes, Letters and Recollections (Lettres et souvenirs), réimpr. New York,: Arno Press, 1981, Vol I, pp.62-63. Mary Caroline Crawford, Famous Families of Massachusetts (Les grandes familles du Massachusetts), Boston, Little, Brown & Co., 1930, 2 vols.
16. Interview d’un enseignant retraité d’Andover.
17. Claude M. Fuess, Creed of a Schoolmaster (Le credo du maître d’école), réimpr. Freeport, New York, Books for Libraries Press, 1970, pp.192-93.
18. Green, op. cit., p.49.
19. Frederick S. Allis, Youth from Every Quarter: A Bicentennial History of Phillips Academy, Andover (La jeunesse de chaque trimestre, deux siècles d’histoire pour la P.A., Andover), Andover, Mass., Phillips Academy, 1979, distribué par the University Press of New England, Hanover, N.H., pp.505-7.  
20. King, op. cit., p.21.
21. Repris à condition de ne pas mentionner le nom de l’auteur des propos.
22. Hyams, op. cit., pp.23-24.
23. Ibid., p.24.
24. Ibid., p.27.
25. Voir New York Times, 29 novembre 1971.
26. Joseph Borkin, The Crime and Punishment of I.G. Farben (Le crime et le châtiment de l’I.G. Farben), New York, Macmillan Publishing Co., 1978, p.89.
27. Allis, op. cit., p.512.
28. Newsweek, 9 août 1943; Boston Globe, 22 juillet 1943. 
29. Green, op. cit., p.28.  

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